Guesnain

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samedi 29 février 2020

Un drame mystérieux aux Corons sans Beurre à Guesnain en 1913 Article paru dans la Petite République du 27 septembre 1913





UN DRAME MYSTÉRIEUX

Qui a tiré ? 

Guesnain. 26 septembre. Un drame étrange s’est déroulé jeudi, vers deux heures et demie de l'après-midi, au numéro 16 du bâtiment C. des corons « Sans-Beurre ». Dans ces corons, composés de maisonnettes ayant au rez-de-chaussée deux pièces étroites divisées par un couloir, et des chambres mansardées, habite une population cosmopolite, parmi laquelle les rixes sont fréquences. C’est là qu’habitait depuis 1910 le mineur Jean Bocquillon, aujourd'hui âgé de trente-deux ans, et son épouse qui compte vingt-sept printemps. En 1911, les époux Bocquillon. qui se trouvaient bien seuls en leur demeure, car le mari travaille toutes les nuits, prirent un logeur, Pierre Bezin, vint-huit ans, mineur, originaire du Pas-de-Calais, et dont la famille habite Vicoigne. Le trio semblait parfaitement s'entendre et rien jusqu'ici, d'après ce que disent les gens du voisinage, ne pouvait faire prévoir le drame. 

Le revolver parle 

Jeudi, vers deux heures et demie du soir, les habitants des corons « Sans-Beurre » étaient mis en émoi par trois détonations successives — des coups de revolver — provenant de la demeure de Bocquillon. On y courut et, dans la pièce à droite en entrant, on trouva la femme Bocquillon gisant sur le sol, sans connaissance, et Pierre Bezin, étendu par terre, une plaie derrière l'oreille droite, et accusant Bocquillon d’avoir tiré sur sa femme et sur lui. Bézin fut mis sur un matelas, dans la pièce où il se trouvait, et la femme Bocquillon, qui avait encore en main sa propre photographie, fut transportée dans la pièce voisine et déposée sur un matelas. Elle n'était pas blessée ainsi qu'on l'avait cru d'abord. mais se trouvait en état de catalepsie, et ce fut en vain qu'on lui prodigua des soins pour la rappeler à elle. Le maire de Guesnain, le garde particulier, le garde champêtre avertis aussitôt, se rendirent sur les lieux du drame et firent prévenir la gendarmerie de Sin-le-Noble. Les Gendarmes arrivèrent peu après, interrogèrent Bézin, qui accusa formellement Bocquillon d’avoir tiré trois coups de revolver sur lui et sur la femme, puis perdit connaissance. Bocquillon interrogé à son tour prétend que Bézin après avoir tiré deux coups de revolver sur lui et sa femme, avait tenté de se suicider. Les recherches des gendarmes firent dé couvrir sur le sol le revolver, une arme du calibre de six millimètres et deux balles de revolver qui avaient éraflé le pied du mur. Le Parquet et le capitaine de gendarmerie furent prévenus. Celui-ci vint sans tarder à Guesnain où il précéda de quelques minutes le docteur. Le praticien constata que la femme Bocquillon se trouvait frappée d’une commotion cérébrale très grave, déterminée vraisemblablement par la scène tragique et que Bézin portait derrière l’oreille droite une plaie assez profonde, intéressant sans doute le cerveau, et faite par un projectile tiré à une distance assez rapprochée mais non à bout portant car il n’existe ni traces de brûlures. ni traces de poudre, de sorte que l’on conclut que Bézin a dû dire la vérité en prétendant qu'on avait tiré sur lui, et qu'il n'a pas tenté de se suicider comme le prétend Bocquillon. Dans la soirée, le Parquet de Douai s'est rendu à Guesnain, accompagné du médecin légiste pour continuer l'instruction.