Guesnain

Guesnain

lundi 11 mai 2020

« La Marseillaise » a les honneurs d'un procès-verbal . (Ou Peppone et Don Camillo, version guesninoise )Article paru dans le Grand Écho du Nord du 8 avril 1928 et repris dans la presse américaine






A GUESNAIN
« La Marseillaise » a les honneurs d'un procès-verbal

(DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)
Toute petite, modeste, montrant à la vue les murs de briques noircies de son abside, l'église de Guesnain ouvre son porche sur une cour où l'on pénètre entre deux colonnes vétustes de pierres effritées.
Elle est, ce dimanche matin, fort joliment parée. Un drap noir aux larmes d'argent encadre l'entrée. Des drapeaux tricolores étalent autour du chœur leurs faisceaux ondulés.
Aux corniches d'acanthe des piliers, de grands panonceaux arborent les outils des mineurs.
Et l'église est pleine d'une foule recueillie.
Les cierges multiplient leurs feux qu'ils jettent en l'air comme des lueurs d'espoir.
Les lentes harmonies d'une fanfare s'égrènent.
On inaugure en cette église la plaque commémorative des enfants du pays morts au champ d'honneur.
M. l'Abbé Gavelle, ancien curé de Saint-Joseph de Sin-le-Noble, officie, assisté de son neveu, curé de Guesnain.
Le R.P.. Zimmermann, ancien aumônier de la 51e division pendant la guerre, monte en chaire. Et des femmes, des veuves pleurent. Des hommes ont aussi les yeux humides.
Ce sont des soldats : les Médaillés militaires de Guesnain, ayant à leur tête M. Verdière ; les anciens combattants de cette commune entourant M, Leleu, chevalier de la Légion d'honneur j les Médaillés militaires de Douai représentés par une importante délégation : MM. Joly, président ; Fauve, Birck, Jouglet, Serrurier, Preuvost, porte-drapeau  le caporal Menet, du 5e d'infanterie, portant le drapeau de "l'Étoile", société de préparation militaire ; M. Cornu avec le drapeau de l'Union des poilus de Douai ; un mutilé de Guesnain tenant le drapeau des Mutilés de Douai ; le colonel d'artillerie Schmidt ; le commandant Marin et le capitaine Delrue, du 509e régiment de chars d'assaut de Maubeuge ; le capitaine Blanc, du 15e d'artillerie ; le capitaine Devienne et le lieutenant Bezegher, de la gendarmerie ; le lieutenant de vaisseau Wiscart, Et puis, des civils ; MM. Bernard, directeur en retraite de l'Ecole normale de la Seine ; Ducœur, Wiscart, Langériaux, ingénieurs des mines d'Aniche; Rainsval, maire d'Epinoy; Verlay, banquier; Wallerand, directeur des tramways ; Braymard, Fontaine, Castelin, Royaux, Christian, les boys-scouts, « Les Eclaireurs de France », avec leur fanion.
Quand l'office est terminé, tous les assistants se groupent autour du monument aux morts, situé en face, et deux médaillés apportent de grosses gerbes de fleurs. Les clairons sonnent « Aux Champs ». La fanfare libre de Guesnain lance les notes éclatantes de la « Marseillaise». C'est un instant d'une solennelle beauté.
Mais le sang Impur n'a pas eu le temps d abreuver nos sillons, qu'une voix se fait entendre : 
— Je vous dresse procès-verbal !
C'est le garde, envoyé par le maire communiste de Guesnain qui, la main à la visière de son képi aux deux galons d'argent, inflige ce pensum au chef de musique, qui vient de faire jouer la « Marseillaise ».
Alors, une immense clameur retentit :
— Bis ! bis ! crient des centaines de poitrines.
Aux applaudissements de l'assistance, les instruments sont de nouveau collés aux lèvres, et l'on recommence.
Après cela, le défilé en musique était de rigueur.
Paul AUDEBERT.


MÊME LA PRESSE AMÉRICAINE EN PARLE :

1929_04_09_The_Chicago_tribune_and_the_Daily_news


COMMUNIST MAYOR FAILS TO HALT 'MARSEILLAISE'
AT GUESNAIN CEREMONY
LILLE, Apr. 8.— A monument to the dead was being dedicated in the little commune of Guesnain, near Douai, yesterday.

All the patriotic societies and the local war veterans were grouped about the flower-covered shaft. The band broke into the spirited phrases of the Marseillaise. It had barely reached the vigorous line, "qu'un sang impur abreuve nos sillons," when the local constable suddenly appeared before the bandleader, saluted him, and shouted,

"Stop, in the name of the law!"

He had been sent by the Communist Mayor of Guesnain. But the band did not stop playing. And when it had finished there were eager cries of "Bis, bis!"

It repeated the anthem.

Today the patriots of Guesnain are wondering under what provision, of the law they are liable for playing and listening to the Marseillaise. Whatever it is, they admit, they are twice guilty. '

Traduction :

LE MAIRE COMMUNISTE N'A PAS ARRÊTÉ MARSEILLAISE À LA CÉRÉMONIE DE GUESNAIN
LILLE, 8 avr. - Un monument aux morts était en cours d'inauguration dans la petite commune de Guesnain, près de Douai, hier.

Toutes les sociétés patriotiques et les anciens combattants locaux étaient regroupés autour du monument fleuri. Le groupe arrivait dans les phrases animées de la Marseillaise. Il avait à peine atteint la ligne vigoureuse, «qu'un chant impur abreuve nos sillons», que le garde local apparut soudain devant le chef d'orchestre, le salua et cria :

"Arrêtez, au nom de la loi!"

Il avait été envoyé par le maire communiste de Guesnain. Mais le groupe n'arrêta de jouer. Et quand il eut terminé, il y eut des cris avides de "Bis, bis!"

Il  répéta l'hymne.

Aujourd'hui les patriotes de Guesnain se demandent en vertu de quelle disposition, de la loi ils sont interdits de jouer et d'écouter la Marseillaise. Quoi qu'il en soit, admettent-ils, ils sont deux fois coupables. 

Un mois plus tard, aux élections municipales la liste du maire sortant était battue comme le révèle l'article suivant dans l'Ami du Peuple du 8 mai 1929



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