Guesnain

Guesnain

jeudi 15 octobre 2020

Nuit mouvementée et grève dans la Concession d'Aniche

LES GRÈVES




Concession d'Aniche

Nuit mouvementée

 Jeudi soir, à l'issue d'une importante réunion tenue à Roost-Warendin par M. Jouveneau, de nombreux grévistes, dont quelques-uns portant des bâtons, se forment par bandes et s’avancent dans la direction de la Scarpe qui sépare le bassin de l’Escarpelle de celui d'Aniche. Mais, se rappelant sans doute que, lors de la grève de 1889, ils s’étaient heurtés à toute une série de brigades de gendarmerie échelonnées, ils envoient des éclaireurs qui aperçoivent les ponts occupés par des gendarmes à cheval. Sans se décourager, ils modifient immédiatement leur tactique et font un très grand détour par le pont de Râches, le pont de Baillon et Anhiers et arrivent à la fosse Gayant, à Waziers, où, là encore, ils se trouvent nez à nez avec les gendarmes. Aussitôt les bandes se dispersent pour se reformer plus loin et s’avancer à pas de loup, avec un silence tel que les patrouilles ne les entendent pas. Ils parviennent ainsi dans des corons de Dechy et de Sin, où ils frappent aux portes et réveillent les ouvriers, dont ils entraînent une partie à leur suite. On les retrouve à la fosse Saint-René, à Guesnain, qui jusqu'à présent est restée étrangère au mouvement. Ils y rencontrent 18 gendarmes à cheval, disparaissent encore et marchent sur Auberchicourt et Aniche. Pendant ce temps, l'officier commandant l'escadron du 4e cuirassiers occupant Aniche depuis plusieurs jours, prévenu par la gendarmerie que le but des grévistes, qui vont être plusieurs milliers, du Nord et du Pas-de-Calais, dans un instant, est d’arriver jusqu'aux fosses de la division d'Aniche, fait sonner la générale et bientôt les hommes sont rangés sur la place, prêts à se porter en avant. L'ordre de partir arrive et alors l’escadron s'ébranle, formant avec les gendarmes des patrouilles qui commencent une véritable chasse à l'homme très difficile, par une nuit sombre, le vent et la pluie. Les grévistes, eux non plus, n'ont pas perdu leur temps, et, avec une véritable science militaire, ils ont employé l’ordre dispersé, plaçant à une série de points stratégiques , importants: sentiers , routes, croisements de routes, petits ponts, ponts de chemins de fer, etc., des petits postes reliés entre eux par des sentinelles volantes.

Les patrouilles arrivent, les groupes disparaissent comme par enchantement, les hommes se cachent dans les fossés, dans les haies, puis se reforment à une certaine distance. Un officier ou un sous-officier voit un groupe qui disparaît tout à coup, près d'une maison, il le cherche en vain. Cependant, il veut en avoir le cœur net ; il enflamme une allumette et s'aperçoit que les grévistes sont collés au mur d’un cabaret et tournent en même temps que lui autour de cette habitation. Ce n’est que vers six heures du matin que tout est rentré dans l’ordre ; soldats, gendarmes et grévistes épuisés de fatigue. Cette manœuvre des grévistes n’a du reste entraîné qu’une soixantaine d’ouvriers de Somain et de Villers-Campeau qui ne sont pas descendus ce matin. Les autres fosses de la division d’Aniche sont au complet. Quant à la division de Douai, elle donne comme eflectif des descentes : Fosse Gayant, 61 descendus sur 201 ; Notre-Dame, 113 sur 338; Dechy, 130 sur 380 ; Bernicourt, 30 sur 137 ; Saint-René à Guesnain, 338. Au total, 681 descendus sur 1.431 Aucun incident grave à signaler. On raconte, toutefois, que des grévistes auraient jeté des pierres à un gendarme, mais sans l’atteindre. 

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