Succès d'une grève des mineurs en 1923 relatée par l'Humanité du 18 février 1923

Les compagnies fléchissent ! Hardi les « gueules noires » !
Sous la pression de la grève, les compagnies du Nord et du Pas-de-Calais lâchent 3,25 Fr., celles de la Loire 3 francs

L'ENTREVUE DE DOUAI MANIFESTATIONS SOUS LES FENÊTRES DE LA MAIRIE OÙ SE TENAIT LA COMMISSION MIXTE

Douai, 16 février. A 10 heures, ce matin, délégation réformiste et. délégation patronale se sont rendues à l'Hôtel de Ville de Douai.

D'habitude, les luxueuses automobiles de messieurs les patrons stationnaient dans les rues voisines. Aujourd'hui, on n'en voit pas une 

On avait eu vent que les grévistes des environs allaient venir (ces grévistes qui n'existent pas.) et on avait pris des précautions. Toutes les. portée de l'Hôtel de Ville étaient gardées par. des flics et on n'entrait qu'en montrant patte blanche. La grille était fermée.

Dans la, vaste cour, un officier de gendarmerie piétinait au milieu d'agents en bourgeois et de journalistes. De l'autre côté de la grille, par petits groupes, les grévistes attendaient en causant. Tout à coup, pas très loin, l'Internationale retentit. Tout le monde se précipite, d'une rue débouche un imposant cortège surmonté de deux drapeaux rouges, ceux des sections unitaires de LaIlaing et de Guesnain.

La manifestation

La place est vite pleine. De tous les coins des chants s'élèvent l'Internationale, Révolution, la Sociale, et des cris vive... vive... vive la grève !  

Lauridan s'accroche à la grille ; le silence se fait

Par votre grève, vous tenez les bras des compagnies obligées d'envisager aujourd'hui une augmentation de salaires. Eh bien vous devez, aux Goniaux, au Quintin et autres (hou ! hou !) que la situation étant telle, iI faut prendre les compagnies à la gorge pour les faire céder, On projette de vous rendre les 3 fr. 25 qu'on vous avait volés. Vous savez bien que ça ne suffit pas. Vous, savez bien que seule l'augmentation demandée par la Fédération Unitaire vous permettra de ne pas crever de faim. C'est pour ça que lundi vous prendrez vous-mêmes les compagnies à la gorge. Après. Lauridan, Moniot, secrétaire du, syndicat, met en. quelques mots les camarades au courant de la situation.

Pendant qu'il parle, la délégation patronale, sortant d'une. salle où elle s'était retirée pour délibérer, traverse la cour. En une vaste clameur, les grévistes la conspuent. Ces messieurs baissaient le nez. 

Retour aux salaires d'avant diminution 

Tel est le résultat de l'entrevue De Douai

Douai, 17 février. (Par téléphone de notre envoyé spécial). Réunis à 10 heures, l'hôtel de ville de Douai, délégués ouvriers et patronaux se sont séparés vers une heure de l'après-midi. C'est dire qu'il ne leur a pas fallu bien longtemps pour se mettre d'accord.

L'accord s'est réalisé, sur les bases suivantes retour aux salaires d'avant-diminution à partir du 16 février. Pour la première quinzaine du mois un supplément quotidien de 2 francs sera payé aux ouvriers adultes, de 1 fr. 25 aux ouvriers de moins de 16 ans et de 1 franc pour les ouvrières. 

Ceci équivaut à une augmentation de 3 fr. 25 par jour pour les adultes et de 2 francs pour les ouvriers de moins de 16 ans. C'est ce que demandaient lés réformistes qui se sont bien gardés de profiter des circonstances pour exiger l'augmentation dont l'absolue nécessité n'est pas niable. Les décisions prises s'appliquent aux trois bassins Nord, Anzin et Pas-de-Calais.