Guesnain

Guesnain

mardi 31 mars 2020

Grève des mineurs dans le Bassin du Nord et à Guesnain, une réunion publique de Goniaux et Quintin, un article paru dans le Réveil du Nord du 21 avril 1906 BASSlN DU NORD 
 A Dorignies. — Réunion de femmes. — En route pour Douai. — Laisser-passer d'une délégation. — Réception par la Municipalité. — Secours aux grévistes. 







BASSlN DU NORD

A Dorignies. — Réunion de femmes. — En route pour Douai. — Laisser-passer d'une délégation. — Réception par la Municipalité. — Secours aux grévistes. 


Vendredi à dix heures et demie salle Ricart près de trois cents femmes se trouvaient réunies et décidaient d'un commun accord do se rendre à la mairie de Douai et de solliciter la distribution des soupes populaires à Dorignies comme cela se fait à Denain, Liévin et Lens. Toutes se mirent en route, mais, elles avaient compté sans la police qui apporta l’ordre de les disperser, en disant néanmoins qu’une délégation serait reçue par la municipalité. Le citoyen Quintin choisit dans le nombre dix mères de famille et accompagnées des citoyens Dupriez, Peckre et Fassiaux,  tous se rendirent à l'Hôtel de Ville de Douai où les attendaient MM. Bertin, maire, Hanotte et Dumont, adjoints. La délégation fut introduite aussitôt dans le bureau de M. le maire. Elle est présentée par le citoyen Quintin qui expose le but de cette démarche : organisation des distributions des soupes populaires où par tout autre moyen, secours aux familles des grévistes. Quintin fait remarquer que les mineurs de Dorignies ont toujours fait preuve de beaucoup de calme et de modération et qu’aucun incident ne fut signalé. Cette attitude milite en leur faveur et il espère que la municipalité leur en saura gré. M. Bertin, maire, déclare qu’il ferait droit dans la mesure du possible à la demande de la délégation. Une commission syndicale à laquelle sera adjoint le brigadier des gardes Ledoux, relèvera les noms des familles de grévistes ayant au moins deux enfants. Le maire espère que la Compagnie de l'Escarpelle suivra la ligne de conduite de la Compagnie de Marles et donnera l'exemple aux Compagnies voisines. La décision de la municipalité sera portée à la connaissance de la commission du bureau de bienfaisance qui statuera sur le nombre de distributions de pain à faire par semaine.
Sur cette déclaration, une citoyenne répond que ce n'est pas avec du pain sec qu’on peut faire de bons soldats pour la France. M. Bertin tient à faire observer qu'à Dorignies il faut avoir six enfants pour être assisté par le bureau de bienfaisance. Il s’attire la réponse de Dupriez que les commerçants de Dorignies contribuent pour une large part aux recettes de la ville. Sur ces mots la délégation se retire, après avoir remercié la municipalité de son bon accueil et de la décision qu’elle a prise en faveur des familles des mineurs grévistes. 
La délégation a regagné Dorignies où le citoyen Quintin a donné connaissance à plusieurs centaines de femmes du résultat de l’entrevue 

Conférences Goniaux 

Hier, à midi le citoyen Goniaux a fait une conférence à Sin-le-Noble sous la présidence du citoyen Bertiaux. Près de huit cents mineurs y assistaient. 
A deux heures et demie, le dévoué secrétaire du syndicat des mineurs du Nord faisait une seconde conférence à Guesnain sous la présidence du citoyen Héreng. Près de mille mineurs et cent cinquante femmes y assistaient, un grand nombre de mineurs n’avaient pu prendre place dans la salle, la priorité ayant été accordée aux mineurs de Guesnain et de Dechy. A cinq heures, le citoyen Goniaux, toujours sur la brèche, faisait sa troisième conférence à Flines-lez-Râches . Un grand nombre de mineurs y assistaient. 

A GUESNAIN 

La plus importante réunion fut celle de Guesnain. Le bureau est composé de trois membres du syndicat jaune qui sont nommés à mains levées. Ces nominations sont saluées par des bravos et des rires. A noter que le secrétaire de séance fut candidat indépendant comme délégué mineur aux dernières élections. Le président remercie l’assemblée de l'honneur qui lui est fait et donne la parole au citoyen Goniaux. Le dévoué secrétaire du Syndicat des mineurs du Nord remercie la délégation des ouvriers de Guesnain qui est venue le solliciter à Sin de venir faire une réunion, à Guesnain ; il se réjouit de la discipline des syndiqués de Guesnain, qui malgré la pression la plus éhontée font cause commune pour faire aboutir les revendications de la corporation. Goniaux rend compte de l’entrevue de Paris avec les représentants des Cies et de la déception qu'ont éprouvée les délégués ayant eu connaissance de la fin de non-recevoir des Compagnies 
Il examine très longuement la question des salaires de base, le salaire moyen des ouvriers de La Cie d’Aniche était avant la grève de 6 fr. 01 d’après M. Lemay, directeur de la Compagnie. Cette compagnie offrait 10 % d augmentation mais ne voulut point signer se contentant de donner sa parole d'honneur. Or, d'après les rapports de la Compagnie le solaire de base à Aniche serait, d’après la convention de 1891, de 4 fr. 01. Le salaire serait avec les augmentations consenties de 5 fr. 62. Il faut donc annuler la convention d’Arras de 1891 et établir un nouveau salaire de base. Très clairement le citoyen Goniaux montre l'utilité et la nécessité du double carnet de paie. 
Il examine ensuite la situation actuelle et montre les avantages accordés par la Cie de Marles à ses ouvriers et il espère que les autres Compagnies suivront cet exemple. Une triple salve d'applaudissements souligne cette déclaration. 
II termine en engageant les mineurs de Guesnain à s'inscrire au Syndicat professionnel, mais non au Syndicat politique de Dombray-Schmidt, subventionné par les moines, les évêques, les Cies et les pires ennemis de la République. 
De nombreuses et chaleureuses acclamations sont poussées par les assistants et de nombreux cris de : Vive Goniaux ! se font entendre. 
Le citoyen Quintin engage les ouvriers de Guesnain à ne point laisser pratiquer le racolage et à déposer une plainte contre les porions et autres employés de la Cie qui se livreraient à cette malhonnête besogne et les engage à organiser les patrouilles. L’ordre du jour suivant est ensuite volé à l’unanimité des mineurs de Guesnain, seuls appelés à voter. 
"Les ouvriers de Guesnain, réunis au nombre de 300. approuvent les déclarations des citoyens Goniaux et Quintin, déclarent faire cause commune avec les camarades qui les entourent, se séparent aux cris de : A bas le syndicat jaune ! Vive le syndicat rouge ! Vive la grève jusqu'à complète satisfaction. 
La sortie a lieu sans incidents ; quatre escadrons de cavalerie stationnent sur le carreau de la fosse prêts à charger au moindre signal, pendant que tous les cavaliers disponibles du 27e d'artillerie, sons les ordres du commandant Morel, passent au trot se rendant dans le bassin d’Anzin. 

La situation 

Calme complet dans tout le bassin du Nord 

Le chômage est toujours complet dans les concessions de l’Escarpelle, de Flines et d'Azincourt. Dans la concession, à la fosse Saint-René, il y a eu 40 descentes. De nombreux grévistes, à la sortie de la réunion, allèrent faire une démonstration toute pacifique devant la fosse Saint-René. Ils avaient repris la route de Dorignies, quand ils apprirent qu’il y avait des descentes. Ils firent demi-tour afin d'empêcher la sortie des rouffions de la fosse. Sur le carreau, plusieurs escadrons de hussards, dragons, cuirassiers attendaient des ordres. Le commissaire spécial Favre, de la sous-préfecture de Douai, fut appelé et arriva en toute hâte. Le citoyen Quintin invita les grévistes à retourner à Dorignies leur faisant entrevoir le danger qu’ils couraient. Un certain nombre suivit ce conseil, les autres attendaient toujours la sortie des rouffions. Le service d’ordre fit établir un barrage, derrière lequel filèrent comme des lapins les faux-frères qui regagnèrent leur domicile. 
Dès que M. Favre eut annoncé cette nouvelle aux grévistes, ceux-ci manifestèrent en chantant et en adressant quelques quolibets aux rouffions, puis ils reprirent la route de Dorignies. Tout est calme dans le bassin.


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